Péridurale : ce que dit la science | Bénéfices, risques, mythes et vérités.

La péridurale est une solution pharmacologique très efficace pour diminuer la douleur des contractions. En France, en 2021, plus de 80% des femmes ont accouché sous péridurale. C'est énorme ! Dans la plupart des discours médicaux, la péridurale est considérée comme presque banale, innofensive, et miraculeuse. Pourtant, cette intervention médicale n'est pas sans risque ! Et oui, souvent on ne nous dit pas tout... Alors j'ai fait mes recherches et j'ai rédigé deux articles éclairants sur ce sujet qui vous permettront, je l'espère, de faire votre choix en conscience le jour de votre accouchement !

Bénéfices et risques de la péridurale

La péridurale... déjà, c'est quoi ? Il s’agit d’une technique d’anesthésie loco-régionale dont l’objectif est de bloquer la transmission de la douleur des contractions. On vient piquer entre deux vertèbres lombaires pour injecter un anesthésique dans l’espace péridural, qui se situe entre les ligaments vertébraux et l’enveloppe nerveuse du canal rachidien. Quand la péridurale est bien posée et bien dosée, la personne enceinte ressent les contractions sans ressentir la douleur associée. L’administration du produit peut se faire de plusieurs façons : administration discontinue (injection d’une dose importante en une fois), continue (perfusion en continu d’une faible dose ajustée au besoin) ou autocontrôlée (grâce à une pompe contrôlée par la personne enceinte).

Le bénéfice de la péridurale est bien connu : elle permet d’atténuer le ressenti de la douleur des contractions. Les péridurales « modernes » ne sont plus les mêmes qu’il y a 20 ou 30 ans, les techniques ont évolué et vont dans le sens d’une meilleure prise en charge de la douleur des parturientes.

Cependant, les effets secondaires, les risques et les inconvénients associés à la péridurale sont nombreux. Les effets cités ci-après ne sont pas exhaustifs, mais quand ils arrivent, la jeune mère se dit souvent “ah, si j’avais su…”. Il me semble donc essentiel de les évoquer ici, car l’information est clé pour faire un choix éclairé.

  • Baisse de tension : Tout d’abord, la personne enceinte peut réagir avec une baisse de tension soudaine (sensation de malaise) qui peut retentir sur le bébé (détresse fœtale), cet effet est fréquent et généralement bien pris en charge par les équipes médicales. L’hypotension artérielle peut persister par la suite, et nécessite une surveillance rapprochée.
  • Défaut d'efficacité : Il peut également arriver que l’anesthésie ne fasse pas effet, ou ne fasse effet que d’un côté, ou que le corps réagisse fort à l’anesthésie et que la personne enceinte ne sente “plus rien”.
  • Rétention urinaire : sous péridurale, les risques de rétention urinaire sont plus élevés (même s’ils ont diminué grâce aux nouvelles techniques modernes), une sonde évacuatrice externe est donc souvent posée pour pouvoir vider la vessie, et il est important de savoir que cette intervention présente de faibles risques infectieux.
  • Brèche de la dure mère : c'est une complication plus rare, mais qui existe, et qui a pour conséquence des maux de tête violents, invalidants, pouvant durer plusieurs semaines après l’accouchement et nécessitant une ou plusieurs interventions appelées “Blood patch”.
  • Diminution de la poussée réflexe : sous péridurale, le réflexe d'éjection du foetus est moins présent, voire inexistant. Il est donc nécessaire de fournir des efforts volontaires de poussée pour faciliter l'expulsion du bébé.
  • Diminution de l'autonomie de mouvement et bloc moteur : la péridurale peut avoir un effet anesthésiant un peu trop fort, qui conduit à une sensation réduite des membres inférieurs, voir d'une impossibilité temporaire de bouger les jambes, ce qui peut avoir des conséquences sur le déroulé de l'accouchement.
  • Autres risques plus rares : une paralysie temporaire des membres inférieurs, des démangeaisons, des frissons, de la fièvre ou encore une douleur persistante au point d’injection.

5 questions essentielles sur la péridurale

Est-ce que la péridurale ralentit le travail ?

Certaines études semblent se contredire sur cette question délicate. Une méta-analyse Cochrane regroupant plusieurs études randomisées contrôlées rapporte que les parturientes sous analgésie péridurale ont eu un 1er et un 2ème stade de travail plus long. D’autres études ne trouvent pas de différence significative concernant la durée de travail. Notons qu’une étude de 2012 suggère que cette absence de différence serait dûe à l’injection d'ocytocine synthétique, plus fréquente sous péridurale. Enfin, un autre facteur pouvant ralentir le travail est cité dans plusieurs études : c'est l’impact de la péridurale sur l’autonomie de mouvement (voir ci-après), et notamment le fameux bloc moteur qui se fait heureusement bien plus rare avec les péridurales “modernes”.

Est-ce que la péridurale augmente le risque de césarienne ?

Selon plusieurs études, dont la récente méta-analyse Cochrane, non. Mais, là encore, les études se contredisent. Une étude australienne de grande ampleur (non randomisée contrôlée) conclut que la péridurale est associée à un plus grand risque de césarienne, notamment pour non progression du travail. Cette étude a été menée en réaction à la méta analyse Cochrane et se base sur une population de 172 785 femmes. Elle souhaite comparer les résultats d'une étude randomisée contrôlée (Cochrane) à une étude observationnelle.

Est-ce que la péridurale augmente le risque d’extraction instrumentale ?

La réponse est plus nuancée : le risque semble toujours plus élevé sous analgésie péridurale, mais se réduit à mesure des progrès techniques. On peut aussi y voir un biais : l'extraction instrumentale serait peut être plus facilement proposée lorsque la parturiente est déjà anesthésiée.

Est-ce que la péridurale augmente le risque de recevoir de l’ocytocine synthétique pendant le travail ?

Il semblerait que oui, cependant les protocoles sont en train de changer progressivement car il est rappelé dans les RFE de 2017 (Recommandations Formalisées d'Experts) que le recours systématique aux ocytociques lors de l’analgésie péridurale n’est ni utile, ni recommandé, puisqu’elle ne modifie pas les taux d’ocytocine endogène. Donc on observe aujourd’hui moins d'injections d’ocytocine sous péridurale qu’avant.

Est ce que la péridurale réduit l'autonomie de mouvement ?

Un des points essentiels à évoquer lorsqu’on parle de la péridurale, c’est la limitation des mouvements, avec le fameux « bloc moteur » (paralysie transitoire des membres inférieurs) et « bloc sensitif » (inhibition des fibres sensitives qui conduisent la douleur et la sensation du toucher). En théorie, la péridurale « moderne » permet de supprimer les sensations douloureuses tout en préservant une capacité motrice permettant de changer de position, voire, de déambuler. Dans la pratique, les conséquences de la péridurale sur l’autonomie de mouvement dépendent notamment de trois facteurs...

Les conséquences de la péridurale sur l’autonomie de mouvement dépendent de :

1. Du type de produit injecté et de sa quantité

Dans un rapport d’un des pôles d'excellence de médecine-chirurgie-obstétrique en Loire Altantique, il est admis que « les effets de la péridurale sur la mécanique obstétricale dépendent essentiellement de la nature et de la concentration des produits injectés et donc du bloc moteur induit ». L’utilisation de la lidocaïne par exemple est reconnue pour augmenter le bloc moteur. Aujourd’hui, les doses d’anesthésiques locaux sont faiblement concentrées, ce qui réduit significativement l’intensité du bloc moteur. Cependant, comme pour l’injection d’ocytocine, bien que les doses administrées d’analgésique soient étudiées scientifiquement, la réponse de chaque femme reste unique, et comporte une part d’imprévisible.

De ce fait, pour une même dose administrée, une femme peut être totalement satisfaite de sa péridurale (ne sent pas la douleur mais sent les contractions, peut bouger), et une autre très insatisfaite (ne sent plus rien, n’arrive pas à bouger ses jambes, sent encore tout d’un côté…). Ainsi dans le rapport de l’enquête périnatale de 2021, on peut lire que « 19,6% des femmes considèrent que la péridurale était « peu ou partiellement efficace » et 3,6% « totalement inefficace ». Enfin, il n’est pas rare sous péridurale, même faiblement dosée, d’avoir une sensation de jambes lourdes et éprouver une difficulté à se mobiliser.

2. Du mode d’administration (En continu, par bolus...)

La péridurale peut s'injecter en continu ou en séquentiel par bolus (doses injectées selon des intervalles définis par l’anesthésiste). Aujourd'hui, des pompes spéciales permettent d’automatiser les injections et de les programmer à intervalle régulier : c’est le PIEB (Programmed Intermittent Epidural Bolus). Il existe aussi un système de pompe autocontrôlée : la patiente peut à tout moment s’injecter une dose d’analgésique : c’est la pompe PCEA (Patient Controlled Epidural Analgesia). Les méthodes peuvent être combinées. La plus efficace semble être le combo PIEB + PCEA, qui est la plus appréciée des parturientes et permet une réduction de l’incidence et de l’intensité du bloc moteur et une réduction du risque d’accouchement instrumental.

3. De la qualité de la pose, qui dépend de plusieurs facteurs

La qualité de la pose dépend :

  • De l’expérience de l’anesthésiste
  • De l’anatomie de la parturiente (scoliose, surpoids, antécédent de chirurgie du rachis…)
  • De la réaction de la parturiente au moment de la pose (calme, difficulté à rester immobile, tremblements…)

Par un exemple, une pose mal effectuée, avec un cathéter posé un peu trop loin dans l’espace péridural peut entraîner une analgésie asymétrique (la femme ressent les contractions d'un seul côté).

Conclusion : La pose d’une péridurale peut donc avoir un effet sur l’autonomie de mouvement de la femme enceinte. Sans parler du cathéter relié à la pompe, du tensiomètre, de la perfusion, du monitoring continu, des risques de baisse de tension impliquant d’être accompagnée dans ses essais de déambulation, qui peuvent aussi entraver une mobilité optimale.

Or, la déambulation et la posture verticale permettent de réduire la durée du travail, de réduire le taux d’extractions instrumentales et de césarienne, de réduire le recours à l’ocytocine de synthèse. Bouger pendant l’enfantement rend les contractions plus efficaces. On comprend mieux comment la péridurale peut venir entraver le processus physiologique de la naissance, en limitant dans certains cas la capacité de mouvement de la personne qui enfante !

Dans le cas d’un « bloc moteur », on peut observer :

  • Une diminution du tonus du muscle utérin et de la puissance des contractions ce qui peut freiner la dilatation du col et gêner l’engagement du bébé, et induire l’injection d’ocytocine synthétique.
  • Une réduction de la tonicité et de la force des muscles pelviens et abdominaux, ce qui peut conduire à des présentations dystociques de la tête, et donc à une extraction instrumentale.

Pour éviter l’apparition d’un bloc moteur : on évite d’injecter une forte concentration d’analgésiques locaux (on peut prendre le temps de réfléchir avant de rappuyer sur la pompe) et on évite l'administration continue, qui même faiblement concentrée est plus à même de provoquer un bloc moteur. Et on croise les doigts pour tomber sur un anesthésiste expérimenté, qui ne mette pas une trop grosse dose dès le départ !

 

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